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Qui comme Ulysse
13 novembre 2006

Nuit blanche pour string rose

Quand la nuit ne tient qu’à un fil

Le contact avec la vie sauvage est une expérience qui marque à jamais dit-on. C'est sans doute vrai en plein coeur de l'Himalaya, de l'Amazonie ou de l'Atacama. Que dire lorsque ce contact arrive en plein centre ville de Montréal, métropole de près de 2 millions d'habitants ?

C'était une nuit noire telle que nous les avions connues depuis notre arrivée. Seul changement, en entrant dans la chambre, de nouvelles valises et divers effets personnels non identifiés étaient disposés sur le lit double à côté du notre. Au vu des articles exposés : deux filles de taille différente. Soit, ça fait partie du jeu de la vie en auberge. Nous serons sans doute réveillés dans la nuit.

La fatigue est importante, le sommeil s'installe très rapidement.

Plus tard, impossible de préciser d'avantage, le code d'ouverture de la porte de la chambre est réalisé avec précision mais sans la moindre délicatesse sonore. Nous ouvrons un oeil. Deux silhouettes féminines entrent dans la chambre et prennent place sans allumer la lumière. Riche idée.

Le sommeil tombe à nouveau, peu après le retour du silence. Le monde des rêves est enfin en accès libre.

C'est alors, au plus profond de la nuit, dans une stupeur grandissante, qu'un grondement se fait entendre. Un bruit sourd, discontinu, proche, tellement proche. Tout est noir, aucune lumière ne transperce.

Une machine ? Un sèche-linge ? Un marteau piqueur ? Un bulldozer ? Non, c'est bien dans la chambre.

Que faire ? Allumer la lumière qui se trouve à 1,10 mètre de hauteur et 0,60 de côté par rapport au pied le plus proche ?

Non impossible, trop d'inconnues pèsent sur ce grondement. Trop de danger.

La façon dont "ça" semble lié à un système de respiration nous indique que c'est animal. Sans doute un énorme animal, capable de faire trembler murs, vitres et meubles.

Où est donc cette bête ?

Etant donné la taille de la pièce accueillant 2 lits de 2m de large collés au mur avec un espacement maximal d'1,20m, elle ne peut être que sur le lit de nos deux voisines inconnues. Les pauvres. Pour elles, il est déjà trop tard.

Des bruits de bouches macabres se font de plus en plus présents. Nous n'osons esquisser le moindre mouvement. Blottis l'un contre l'autre, sous les couvertures, tournés vers l'autre mur, nous demeurons prostrés. L'instinct de survie sans doute.

Une des deux silhouettes était assez imposante. La bête se contentera peut être du menu, déjà copieux, offert par le lit d'à côté. La bête semble s'apaiser, les bruits s'estompent quelque peu. Le temps est alors aux tergiversations.

Qu'est-ce exactement ?

Etant donné le coffre, un ours semble le plus probable, du moins au niveau du volume. En revanche, au niveau de la localisation géographique, la thèse manque un peu d'aplomb.

Certes, quelques cookies choco-nougatine traînent sur la table de chevet, mais tout de même, pourquoi notre chambre ? Et comment ?

Toutes ces questions resteront sans doute sans réponse. Par un mystère absolu, le sommeil est à nouveau tombé. Une chute du taux d'adrénaline ? Un gaz émis par la bête ?

Nous n'avons pas eu le temps de tenter la réaction préconisée par le manuel de survie de Sullivan J. Turner, expert mondial, en cas de rencontre inopinée avec un ours : la fuite lente à reculons et en sifflotant (pour signifier sa non-hostilité).

Toujours est-il qu'au petit matin, quand la lumière fut revenue, un nouveau mystère nous attendait.

Aucune trace d'effraction, de griffe, de morsure, aucune tâche de sang. Les victimes, ainsi que leurs valises et divers effets personnels non identifiés avaient disparus. Seuls éléments restants : quelques poils et cheveux sur le sol, les draps en boule sur le matelas. Au pied de notre table de chevet, un morceau de tissu rose. Quelques dentelles, aucun doute : il s'agissait d'un string rose.

Un string rose. Une seule certitude dans un tel moment de confusion, il s'agit d'un message.

Guillermo Lamour et Xiang Wang qui disparaissent, un appartement mou sans doute piègé...

Un string rose ? Un animal féroce (disposant du code d'entrée) ? Qui pouvait avoir une telle maîtrise de la vie sauvage ? Que veut-on nous faire comprendre ? De quoi cherche-t-on à nous écarter ?

Une enquête devait être menée. Pas question de faire machine arrière, nous étions déjà trop impliqués. Qui d'autre que nous pouvait mener l'enquête ? Personne ne nous croirait. Nous connaissions d'avance les réactions dubitatives et sarcastiques face au récit de notre expérience.

"Il ne s'agissait que d'un fort ronflement humain"

"De mémoire d'homme, on a jamais vu de bête sauvage de la taille d'un ours roder sur la rue Julien"

Diantre ! Rien n’est plus incrédule qu'un autochtone assis sur ses certitudes et son confort urbain. Et de toute façon, à qui faire confiance ?

Il s'est bien passé quelque chose de sauvage, sauvage mais programmé, dans la nuit noire du vendredi 22 septembre 2006 au 4136 Henri Julien Montréal QC Canada.

Nous devons savoir de quoi il en retourne, il en va de notre survie. Une nouvelle journée s'annonce, gardons jusqu'au bout cette lucidité. Ne cédons pas à de faciles extrapolations... 

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